Avant les barbelés Des isbas penchées Par la neige et le froid Sous le ciel incolore Les hauts miradors Me glacent le sang, déjà Deux mille bornes à l'est de Moscou J'ai pris 10 ans dans ce trou Tcheliabinsk, Mordovie Suis-je encore en vie? Faut que je réfléchisse Au fond de la gloubinka On n'existe pas Dans la colonie 6 Bien sûr j'ai fait des conneries Très cher j'en paye le prix Gardiens tarés qui rackettent La paix, ça s'achète Répondre, aucun zek n'ose Partout mon corps n'est qu'un bleu Je vivrai pas vieux Ici la vie c'est pas grand-chose Au coeur du goulag moderne Tu baisses les yeux, tu la fermes Pas l'droit d'pisser, de dormir De se recueillir Faut me rééduquer Peindre des matriochkas Pas faire un faux pas Tabassage assuré C'est la Russie de Poutine La nostalgie de Staline Qui a dit démocratie? J'en vois pas ici Terre oubliée de Dieu Je suis moins qu'un animal Fatigué et sale Dans ce terrible jeu De mon trou à rats je pense à toi Nadejda Tolokonnikova Mon père est mort ce matin Il avait pris le train De Volgograd pour m'embrasser 20 heures dans le cabanon Froid comme un maton Son vieux coeur a lâché Dans son grand sac trop lourd Du pain, des oeufs, de l'amour De l'amour, de l'amour De l'amour, de l'amour (Et pourtant, et pourtant, et pourtant je suis humain Comme vous tous ici, ce soir Cette chanson-là, j'l'ai écrite après les évènements Qui se sont produits le 7 janvier à Paris Où nos rêves adolescents Ont été mitraillés à la kalachnikov Et des mecs comme Cabu, comme Wolinski, sont tombés Des gens qui, dans notre adolescence Nous faisaient tellement rire Le Grand Duduche est mort, tué à la kalachnikov Alors, quand on écrit des chansons On peut pas s'empêcher d'écrire une chanson sur ça J'ai pleuré pendant des jours J'ai cru qu'c'était mes frangins qui étaient morts Et euh... j'en ai écrit plein, hein Elles s'appelaient Je suis Charlie Elles s'appelaient Je suis flic, Je suis juif, Je suis arabe Voilà... celle-là s'appelle tout simplement Je suis humain)