Le chanteur indigène a sorti son violon Son gazou, sa bombarde et son accordéon Enfin la panoplie des accessoires ethniques Qui pâment les Français et réveillent nos critiques Le chanteur indigène a commencé son show Dès les premiers accords l'Olympia crie bravo Dans son harmonica il souffle jusqu'à mordre Et les doigts d'son violon écartèlent ses cordes Mais sous les projecteurs il est seul à savoir Qu'il en met d'autant plus que c'est son dernier soir Depuis qu'il a compris le commerce exotique Où l'on vend en bibelots son peuple et sa musique Le chanteur indigène finit son numéro Jusqu'au bout sans omettre une seule note, un seul mot Mais le rideau tombé, lorsque la foule folle Lui réclame à grands cris d'autres rythmes créoles Le chanteur indigène revient sur le plateau Remercie son public et seul à son micro Soudainement petit et tragiquement blême Se met à réciter ce singulier poème On est toujours un peu l'Iroquois de quelqu'un Que l'on soit québécois, breton, nègre ou cajun Je vous laisse à penser quel peut être le vôtre On est toujours un peu l'indigène d'un autre Et puis l'homme en silence a plié son violon Son gazou, sa bombarde et son accordéon On dit qu'il est parti retrouver sa savane Et qu'il vit là depuis, tout seul dans sa cabane On est toujours un peu l'Iroquois de quelqu'un Que l'on soit québécois, breton, nègre ou cajun Je vous laisse à penser quel peut être le vôtre On est toujours un peu l'indigène d'un autre