Ma mère, il faut que je vous dise Que le gars Jean-Pierre, un matin Me rencontrant près de l'église M'emmena chasser le lapin Les belles manières de ce jeune homme Je l'avoue, me plaisaient beaucoup C'est pourquoi j'acceptai. En somme Qu'est-ce que je risquais? Rien du tout Moi, je portais la carnassière D'un petit air hardi Et lui portait en bandoulière Son joli p'tit fusil Ce fusil à deux coups, ma mère Etait un merveilleux objet Que lui avait acheté son père A sa naissance, à ce qu'il paraît Comme je suis très curieuse Et que j'adore tout savoir Je lui dis: "Je serais heureuse Si tu voulais me le faire voir." Alors, le galant, pour me plaire Le sortit d'son étui Ah! Le joli fusil, ma mère Ah! Le joli fusil Le canon était plein de charme Oui, mais pendant que je maniais Cette belle et dangereuse arme Jean-Pierre, dans le cou, m'embrassait Il faisait un soleil superbe Tout à coup, sans savoir pourquoi Je tombais sur le dos dans l'herbe Avec le fusil dans les doigts Comme sur moi roulait Jean-Pierre Voilà que l'coup partit Ah! Le joli fusil, ma mère Ah! Le joli fusil Est-ce la longueur de la route Ou la lourdeur d'un ciel trop doux? On s'est endormis, sans nul doute Avec le fusil entre nous Au réveil, on r'vint au village Sans avoir vu le moindre lapin Depuis, je grossis du corsage Et je ne me sens pas très bien Ce n'est rien, répondit la mère Dans quelques mois d'ici Ton fils portera, comme son père Un joli p'tit fusil